Chose promise, chose due. Au mois de mai dernier, nous vous avions informé quant à notre rencontre avec Stephan Bodzin lors de la soirée « Senses 2 » organisée par Candyhouse à Toulouse dans la salle du Bikini. Au cours de cette rencontre, nous avons pu réaliser un entretien avec l’un des plus influents producteurs techno actuels. Ce fut pour nous l’occasion d’évoquer différents aspects de sa profession et de sa musique lors de cette merveilleuse soirée. En pleine restructuration du site et un peu débordés par de nouvelles demandes, nous nous excusons auprès de vous, chers lecteurs, pour cette attente.
Nous remercions une fois encore Candyhouse pour leur confiance et exprimons notre gratitude à Stephan Bodzin pour sa gentillesse qui témoigne d’une grande sincérité à l’égard de son public.
SE | Vous allez être sur scène dans quelques minutes, quels effets cela vous fait d’être à Toulouse et que pensez-vous du public français ?
Bien, qu’est-ce je peux dire ? J’ai été à Toulouse tellement souvent. La France de toute façon, a toujours été formidable pour moi. Depuis ces 10 dernières années, le public français a toujours été spécial. Ils sont vraiment dans la musique, dans ce que je fais, j’ai hâte d’être avec eux !
SE | Quels sont les artistes qui vous ont influencé et si, tel est le cas, pourrez-vous citer un ou plusieurs morceaux ?
Il y a tellement de bonnes musiques partout. Mais moins j’essaie de m’inspirer d’autres artistes et plus ma musique est caractéristique. C’est pour ça que mon dernier album a pris autant de temps. Je me suis un peu perdu avec toutes les différentes influences. Donc, j’essaie de ne pas être inspiré, peut-être Hanz Zimmer a eu une petite influence.
SE | Comment avez-vous vécu les années 90, dans le temps où le mur était tombé ?
Pour être honnête, durant cette période, si vous preniez ma discographie vous seriez très surpris par la musique merdique que je faisais. J’étais dans la trance très commerciale, j’étais jeune, j’ai encaissé l’argent, j’ai pris du bon temps, j’étais juste un producteur de l’ombre et je faisais de la musique pour l’argent. Ensuite, j’ai évolué vers une musique plus émotionnelle et puis le temps est venu où je me suis regardé dans un miroir en me demandant ce qu’était ma musique et qui j’étais… Ça m’a pris du temps pour trouver le Stephan Bodzin que vous connaissez maintenant. Mais oui, je connais bien la techno des années 90 bien sûr. Je suis toujours un grand fan de ce qu’a fait Plastikman dans ses grandes années !

SE | Vous semblez critique envers vous-mêmes quand vous parlez de ce que vous avez fait quand vous aviez la vingtaine.
Je faisais aussi un peu de composition de musique classique.
SE | Vous avez gardé quelque chose de cette période ? Ça vous arrive de composer quelque chose et de penser « putain c’est comme si j’avais 20 ans ! » ?
Pas vraiment, je reste toujours connecté à cette période, c’est quelque chose que tu gardes, tu ne perds pas tout, donc toutes ces influences pavent ton chemin.
SE | Vous utilisez des instruments particuliers sur scène, d’où vous vient cette idée ?
Quand j’ai fait mon dernier album l’année dernière (ou l’année précédente ? j’en ai produit 14), j’avais cette idée en tête de retourner sur scène avec un show live, parce que je pouvais plus jouer avec ce vieux matériel donc j’ai décidé de faire djing seulement pendant 2-3 ans. J’adore jouer en live, je me suis toujours demandé comment jouer comme un artiste solo d’électronique avec autant de live que possible pour montrer aux gens que je suis vraiment influencé par tout ce qui concerne le live.
SE | C’est assez impressionnant.
Oui, ce contrôleur est transparent avec le plexiglas et tu peux voir que chaque bouton correspond à quelque chose, c’est un instrument qui procure beaucoup d’émotions, du moins autant que cela était possible. C’était l’idée qu’il y avait derrière, ce n’était pas d’être « clinquant ». Je l’ai fait aussi beau que j’ai pu. J’aime les belles choses alors j’ai fait tout le design, le schéma, le concept. Je ne me suis pas focalisé sur sa beauté, mais sur ses fonctions. Au passage, je viens juste de recevoir le deuxième, au cas où celui-ci viendrait à ne plus fonctionner.
SE | Il y a une tendance en ce moment, beaucoup de producteurs font des shows live maintenant, pourquoi pensez-vous que ce mouvement a pris autant d’importance ? Pensez-vous que ce soit dû au fait que beaucoup d’entre eux se sentent complexés de ne pas être musiciens ?
J’aime beaucoup cette tendance, c’est la nouvelle génération qui fait ça dans les clubs maintenant. Et puis c’est toujours cool d’être dj comme ce soir, mais ce qui est important ce n’est pas le dj, c’est la musique. De plus en plus, c’est le cas. Dans cette logique les shows live deviennent plus puissants. Pourquoi écouter le dj quand tu peux jouer tout le truc en live ? Je fais un show dj ce soir même si j’ai un bon show live qui tourne en ce moment, mais c’est trop de shows donc je ne peux pas tout faire live. Il y a aussi le problème quand on voyage. Mais j’aime cette tendance, elle est cool, car tu entends la musique de l’artiste et non un truc de dj.
SE | Ça vous arrive d’adapter ce que vous jouez par rapport au public ?
Oui, c’est ce que je fais lorsque je joue en live. J’ai un show live qui est synchronisé aux visuels donc ça devrait être le même set à chaque fois, mais ce n’est jamais le cas. La synchronisation n’est pas aussi stricte que cela, j’ai quand même des repères que je dois suivre, mais à chaque fois c’est totalement différent.
SE | Vous avez des projets avec « Recorder » ?
Non, ça ne va jamais arriver. On a eu des requêtes pour les dernières 10 années mais non.
SE | Et « Electrochimie » ?
Vous parlez du passé. Mais avec Marc Romboy, on a un projet « back to back » et versus. C’est possible qu’on soit en studio ensemble, mais c’est autre chose. Pour l’instant la cible est de finir mon nouvel album.
SE | De quelle manière composez-vous ? Par quelle partie commencez-vous, le rythme, la bassline ou la mélodie ? Avec quels logiciels et instruments?
Haha c’est toujours LA question. En fait, il n’y a pas vraiment de plan. Je crée beaucoup de choses lorsque je voyage, quand je suis relax et avec une petite gueule de bois. Je commence avec la bassline et puis les mélodies, puisque c’est tout ce que je peux faire dans l’avion. Vis-à-vis des mélodies, beaucoup de mon dernier album a été composé dans l’avion lorsque je voyageais. Quand j’arrive chez moi, je m’attaque aux beats, ce qui va influencer tout ce que j’ai fait. C’est un peu comme un jeu de ping-pong. Je commence souvent avec les mélodies. J’ai beaucoup utilisé « Logic », mais depuis je reviens progressivement vers « Abelton ».
SE | Quels sont les artistes que vous suivez le plus actuellement ?
Personne. Je suis dans le studio 4 à 5 jours par semaine et dans l’avion, je prépare des sets.
SE | Comment expliquez-vous l’engouement du public pour « l’electronica » et « l’ambient » au détriment des sons plus dancefloor ?
Ça me plaît, si je suis honnête, la musique que je crée pour mon prochain album est du dancefloor. J’essaie de combiner le dancefloor avec de la musique mélodique, donc tu vas danser, mais aussi écouter.
SE | Merci Stephan
Merci et bonne soirée.
Traduit de l’anglais au français
Merci à Sammy Baba pour sa participation