A lire : la relève Barcelonaise prend la parole
SE | Parlons d’abord de vous, depuis quand avez-vous commencé le djing ? Quels sont vos modèles ? Votre style ?
Gerard Bauza : J’ai commencé en 2004, j’ai découvert la musique électronique en étudiant et en jouant du saxo dans un groupe avec mes amis. J’ai pris mes influences dans tous les styles car j’adore la musique en général. J’ai grandi en écoutant Oasis et Nirvana ! Donc dans mes débuts, c’était un peu plus dur. J’ai évolué avec le temps que ce soit avec les productions et dans mes sets. Je suis très mélodique et plein de puissance en même temps.
Julí : Alors j’ai commencé ma carrière artistiques aux début des années 2000, et plus professionnellement parlant en 2008 où j’ai réellement trouvé mon chemin, passant de la makina au hardcore puis à la techno où je me sens dans mon élément. Plus précisément dans un style que je classifierais « deep techno » avec beaucoup d’harmonies et de vie. J’aime raconter une histoire dans mes sets. Mes modèles à l’heure actuelle sont ceux qui m’ont toujours impressionnés : Joris Voorn pour sa régularité et sa qualité artistique. Laurent Garnier pour son art à envoyer tout et n’importe quoi quand bon lui semble et avec classe ! Stephan Bodzin pour son génie et sa qualité de production, Âme pour ses playlists plus belles les unes que les autres et bien d’autres.
SE | C’est ce que dit Laurent Garnier à propos de ses sets « raconter une histoire. », quelles sont les émotions que vous tentez de faire passer dans vos sets ?
Julí : En effet mes sets sont très variés et assez imprévisibles, de la deep en passant par la techno ou par la house music, j’essaie de satisfaire mon public au maximum tout en m’adaptant. J’évite de faire ce que beaucoup de djs font, c’est-à-dire jouer la musique qui leur plaît à eux même sans prendre soin du public qu’ils ont en face.
SE | Il y a beaucoup de festivals aujourd’hui qui attirent les foules, préférez-vous jouer dans ces lieux ou dans les clubs ?
Gerard Bauza : J’aime jouer dans les endroits où il y a une proximité avec le public. Mon set étant très progressif, je peux sentir ce dont le public a besoin à tout moment. J’aime communier ainsi avec le public, je ressens une paix intérieure et de l’euphorie en même temps. Normalement, je ne prépare rien pour faire mon set, j’aime mieux improviser sur ma playlist. J’ai des références de Fairmont avec sa techno mélodique, je continue avec Mano le Tough parce que c’est un super dj, avec Julí ou avec des tracks de Laurent Garnier.
Julí : J’aime jouer sur de grosses scènes c’est toujours plaisant, mais sans hésitation, je préfère les salles plus intimistes avec 300-500 personnes où le stage est bien en contact avec le public. On peut réellement prendre son pied ! J’adore préparer mes playlists sans même avoir à les jouer et me laisser aller à l’improviste, laisser parler mon inspiration, je suis assez à l’aise dans ces situations.
Gerard Bauza : Je pense qu’il y a un lieu pour chaque type de set. Personnellement, j’aime jouer dans les petits clubs quand il n’y a pas de barrière avec le public, tu peux ressentir plus de sensations. J’ai toujours eu de bons feelings dans ce type de clubs.
SE | Vous êtes organisateurs et dj, que préférez-vous, organiser ou jouer ?
Julí : Alors ce sont deux choses totalement différentes, c’est pour cela d’ailleurs que je joue très rarement sur des événements que j’organise, car ce sont deux choses incompatibles pour moi. Jouer sans prendre de plaisir en regardant entre deux tracks si tout se passe bien. Je suis assez perfectionniste et j’aime le travail bien fait mais les deux secteurs me plaisent beaucoup, j’aime le contact avec les artistes, mes équipes, le public.
Gerard Bauza : Je me considère artiste mais j’aime les facettes du métier d’organisateur, surtout quand il y a de grands invités. Une organisation ou un set personnel que le public a aimé me donnent autant de satisfactions. Quand un événement que nous organisons se passe bien, je sens que nous grandissons professionnellement en tant que société de production mais que nous devons encore apprendre beaucoup, et ça, c’est plus qu’une satisfaction.
SE | Quel est votre plus beau souvenir en tant que dj ?
Gerard Bauza : Je me rappelle comme si c’était hier de la première fois où j’ai joué deux vinyls. Cela a été la meilleure sensation du monde ! Mes amis qui étaient dans la salle se sont mis à applaudir comme si j’étais un héros ! À partir de ce moment, j’ai su à quoi j’allais consacrer le reste de ma vie et j’ai décidé de commencer ma carrière.

Julí : L’un de mes meilleurs souvenirs et il y a pas si longtemps de ça d’ailleurs, c’était à Barcelone lors d’une rooftop. On jouait juste derrière Jan Blomqvist et on avait mis pas mal le paquet sur la sélection musicale et dans une discussion avec Jan Blomqvist un peu plus tard dans la soirée, il m’a avoué avoir été bluffé par ma musique en me disant que j’avais vraiment ma place dans la cour des grands. Cela ma réellement touché et rempli de gratitudes. Je me souviens aussi des années 90 dans les clubs que tenait mon père, où il était dj également et très doué d’ailleurs. Je le regardais faire pendant des heures ! Oui j’ai eu une enfance assez « olé olé », je squattais les clubs très jeune puisque nous avions l’appartement au-dessus du local et il m’arrivait de débouler en pleine nuit et d’assister aux « chouilles » de l’époque et la journée, je prenais à mon tour les platines en essayant de reproduire ce que faisait mon père. Un souvenir qui restera gravé a jamais! Il y a 22 ans de cela !
SE | Les festivals se ressemblent beaucoup et il en va ainsi avec les soirées ? Pensez-vous que l’on ait atteint un seuil de saturation ? En tant qu’organisateur, que comptez-vous faire pour remédier à ce problème ?
Gerard Bauza : Nous avons démarché la société Queriendo pour faire un super festival mais à petit format, cela aurait été un succès mais nous avons eu un problème avec les investisseurs et on a dû annuler au final. Cela a été une grande désillusion pour nous. A présent, on prend beaucoup de plaisir en réalisant des événements à petit format mais avec une grande qualité musicale, aujourd’hui les plus grands artistes sont promoteurs.
Julí : Non je ne pense pas qu’il y ait réellement une limite car en effet, il y a beaucoup de festivals qui se ressemblent, mais il y en a aussi qui sortent vraiment du lot comme le Dekmantel a Amsterdam, Into the Valley, The Lost Village en Angleterre, le DGTL et j’en passe. Mais je trouve que justement ces deux dernières années les organisateurs ont mis les bouchées doubles en alliant les festivals avec l’environnement, le recyclage, le bio. Je trouve cela vraiment top et je valide à 200%. En ce qui concerne notre cas, nous travaillons sur un projet qui devait se faire cette année mais que nous reportons a l’année prochaine par manque de temps et qui va vraiment plaire à beaucoup de monde. Stay connected !
SE | Quels sont vos projets en tant qu’artistes et en tant que promoteurs ?
Julí : Beaucoup d’ambitions dans les deux tant comme artiste que comme promoteur, j’ai vraiment du mal à choisir, c’est pour cela que je me laisse porter en prenant toujours le maximum de plaisir et nous verrons ce dont demain sera fait. L’un ou l’autre me comblera dans tous les cas, c’est mon élément !
Gerard Bauza : En tant que promoteur, le principal objectif est de continuer à grandir en retenant les leçons du passé. Nous avons entamé la nouvelle saison pour Locked, dans une nouvelle location qui marche très bien, on invite de grands artistes, ce qui est aujourd’hui indispensable. Sur le plan artistique, je vais trouver le temps de me poser en studio et de terminer le nouveau « live » ainsi que quelques tracks.
SE | Donc niveau production, des choses sont-elles à prévoir ?
Julí : Bien sûr je produis et j’ai d’ailleurs un studio à la maison, mais je travaille la musique surtout l’hiver quand le temps me le permet, car l’été c’est la haute saison et donc je n’ai pas trop le temps de passer des heures au studio.
SE | Vous projetez de créer un label ou d’en rejoindre un ?
Gerard Bauza : Oui ! Cette année, j’ai sorti mon premier morceau dans une compilation pour ADE de Florida Music. J’attends d’avoir le temps suffisant pour davantage me consacrer à la production. Julí, Manuel Heridida et moi, sommes en train de préparer un nouveau « live », on espère pouvoir le présenter bientôt. J’aime l’idée de créer un label à l’avenir mais je fais les choses étape par étape.
Julí : J’ai quelques tracks déjà dans les bacs mais j’ai décidé d’attendre le jour où j’arriverai à m’exprimer pleinement. Je prendrai le temps qu’il faudra. Rien ne sert de courir.