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Pouvoir Magique, une spiritualité à toute épreuve

Duo hallucinogène, Pouvoir Magique c’est avant tout deux ouvertures d’esprits multi-formes qui s’allient pour la transcendance de la musique inter-culturelle. Jeunes et pleins de valeurs, Bertrand et Clément possèdent toutes les cartes en mains pour vous faire voyager. Et c’est lors de notre passage à l’édition 2017 du Garorock Festival que nous avons eu la chance d’échanger avec ces deux chamans sur les nombreux trésors qu’ils recèlent. Rapide et efficace, l’entretien nous a convaincu d’une chose : Pouvoir Magique envoûte, Pouvoir Magique transporte.

SE | Vous avez véritablement un style bien particulier, pourriez vous nous dire où vous allez chercher toutes ces influences qui vous imprègnent ?

Clément : Nous avons beaucoup de formats d’inspiration que ce soit le cinéma, le jeu vidéo, le digging quand on cherche à droite et à gauche, les vinyles chez les disquaires.

Bertrand : Nous faisons beaucoup de recherches musicales en amont. Tout ce que l’on produit et tout ce que l’on joue résulte d’heures de travail durant lesquelles on va chercher des disques chez un disquaire et récupérer divers morceaux, que l’on va souvent éditer pour en faire un format beaucoup plus club. On aime remixer et créer une espèce d’interprétation musicale de ces grosses périodes des années 70-80, de ces musiques africaines et même des musiques du monde en général. C’est un puit sans fond ces musiques là ! Il y a toujours quelque chose à récupérer. Toutes ces influences sont aussi la base de beaucoup de choses aujourd’hui que ce soit le hip-hop ou la techno. C’est évidemment avec tous ces mouvements de populations qu’il y a pu avoir au 18ème siècle, au 19ème siècle et au 20ème siècle que ce grand melting pot culturel s’est créé, cet échange musical que nous voulons essayer d’apporter à Pouvoir Magique et à Mawimbi par extension. C’est une espèce de grand voyage musical, de grand voyage culturel.

Clément : En terme de production, par exemple, j’écoute beaucoup de musiques méditatives qui lancent des ambiances très planantes mais qui peuvent aussi inspirer dans cette démarche de faire des choses. On pioche réellement partout.

SE | Peut-on alors parler d’une ré-appropriation personnelle ?

Bertrand : Alors on ne s’approprie pas, c’est très important. Le mot appropriation est quand même quelque chose de très « touchy » surtout quand on évoque la culture. On ne s’approprie pas, on respecte à chaque fois la musique originale, c’est à dire que si on sort quelque chose, on va toujours faire en sorte de le créditer, on va toujours faire en sorte de respecter la musicalité d’origine. Pour un remix, par exemple, on peut ré-interpréter la musique à notre manière mais en aucun cas se la ré-approprier, il y a une nuance. On va respecter le message qu’a voulu faire passer l’artiste, et le ré-interpréter avec notre propre sensibilité. Par exemple, on vient de finir un remix pour Calypso Rose dont le titre est « Far From Home » pour lequel on a gardé les voix et quelques éléments par ci par là, et quand vous comparez l’original avec le remix cela sonne totalement différent tout en gardant l’idée qu’a voulu faire passer Calypso Rose en parlant de ses origines.

Pouvoir Magique, ITW Garorock 2017

SE | Au sujet du cambriolage qu’il y a eut dans votre studio, vous avez su garder la tête haute et cela en dit long sur vos valeurs et votre force. Pouvez vous nous en dire un peu plus sur l’histoire du disque dur volé et de ce fameux LP Disparition ?

Bertrand :
Ce qu’il s’est passé c’est que, tout bonnement, quand on se fait cambrioler il y a des choses matérielles et parfois des choses beaucoup plus sentimentales qui partent. Là, malheureusement, il y a eut ce disque dur qui a été volé. Il contenait 6 ans de maquettes et tous les projets de base avec lesquels on travaille pour faire nos productions. Alors à partir du moment où on n’a plus ce disque dur là, on ne peut plus travailler. Il y avait des démos qui étaient quasiment finies, des choses qu’on ne pouvait plus du tout toucher. Et ce qu’il s’est passé c’est que, à force d’envoyer des mails à des amis, de récupérer sur internet des démos, on a réussi à reconstituer un album de 12 tracks qu’on a appelé Disparition. Ces 12 tracks sont sortis il y a quasiment un mois jour pour jour, et ce sont 12 démos qui ne seront jamais finies. Mais au final, c’est quelque chose qui représente le projet Pouvoir Magique sur sa globalité, c’est à dire de son commencement en 2012 jusqu’à aujourd’hui en 2017. Il s’agit de morceaux qu’on n’écoutait plus, de morceaux qu’on avait totalement oubliés et le fait de retomber sur des vieilles démos comme ça nous a semblé aussi intéressant à partager avec le public.

SE | Votre dernier clip pour Eclipse laisse penser lui aussi à un mélange culturel et semble propager une émanation d’Afrique, quelle histoire se cache derrière ?

Bertrand :  Effectivement on a sorti un clip mais il ne se passe pas du tout en Afrique, il se passe dans la forêt de Fontainebleau. Mais c’est intéressant que tu dises ça parce que nous ce qu’on voulait c’était faire un clip totalement intemporel et sans définition du lieu. Nous ne souhaitions imposer aucune unité de lieu, ni aucune unité de temps et faire de ce clip quelque choses de totalement fantasmagorique, fantastique, imaginable dans n’importe quel pays, durant n’importe quelle année. Nous souhaitions créer un flou, une confusion ente le futur et le passé, pour finalement rejoindre aussi ce concept de « casser les codes ». Pouvoir Magique est beaucoup plus dans le voyage, beaucoup plus dans quelque chose qui est intemporel. Dans 10 ans, il sera possible de revoir ce clip là sans savoir qu’il se déroulait en 2016. Tout va bien plus loin que la musique, il y a quelque chose de très solaire. Le clip peut faire penser à l’espace car ce côté de Pouvoir Magique nous laisse imaginer une exoplanète avec des cultures noires, des cultures maghrébines, des cultures asiatiques, des cultures blanches qui se mélangent et créent un monde parallèle. C’est un peu cela notre positionnement. Pouvoir Magique c’est réellement ce voyage musical intemporel.

SE | Vous avez l’air empreints de pleins de valeurs incroyables et prometteuses, comment définiriez vous simplement votre spiritualité ?

Clément : Pour résumer, le but c’est d’arriver à mélanger toutes les cultures, à abattre toutes les barrières qu’il peut y avoir, à faire quelque chose de très uni avec tout ce que le monde peut nous offrir actuellement de son héritage, du présent et de ce qu’on pense du futur.

Bertrand : Et en essayant aussi de ne jamais tomber dans le cliché qui peut-être très vite border line. On veut toujours être dans notre projet, dans notre univers à nous qui est quelque chose d’indéfini.

 

En bref, une rencontre au sommet qui valait son retour online pour un Pouvoir Magique aux valeurs éclatantes, solides, hallucinantes. Et pour vous entrainer un peu plus dans leur sorcellerie, nous vous laissons savourer leur dernier LP Disparition disponible à prix libre sur bandcamp. À bon entendeur.

Par Roxane

Bordeaux, France.

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