On s’est rendu au Mutek à Barcelone qui fêtait son dixième anniversaire, une nouvelle occasion pour nous de passer un séjour inoubliable en Catalogne, de découvrir des artistes exceptionnels et de savourer des shows audiovisuels extraordinaires.
Comme précisé dans notre article preview, le Mutek a été créé il y a 20 ans dans le but de promouvoir les artistes confidentiels issus des musiques électroniques et les arts digitaux dans ce qu’ils pouvaient offrir de meilleur. Festival de niche, le Mutek s’est naturellement exporté à travers le globe à l’exception du continent africain, pour l’instant.
Le Mutek de Barcelone se déroule dans plusieurs lieux emblématiques de la ville, souvent chargés d’une dimension symbolique et culturelle. On a retenu pour vous les moments qui nous ont le plus marqués, point de vue entièrement subjectif et totalement assumé.
Les shows A/Visions 1&2 qui se sont respectivement tenus à l’Institut Français et à l’Auditori ont été, selon nous, le point d’orgue du Mutek BCN. Réunissant l’élite des arts digitaux, ont eu droit à des spectacles hors du commun. Le duo Push 1 Stop/Wiklow a offert aux festivaliers des projections 3D que n’aurait renié Georges Lucas, le tout porté par une production musicale sombre d’une grande intensité. Plus tard dans la soirée, Martin Messier et YRO ont entraîné le public dans une plongée musicale vers l’infiniment petit à travers une pièce audiovisuelle fascinante. Fidèle à son génie, Herman Kolgen a secoué l’Auditori avec un dialogue complètement fou entre supports virtuels; enfin, assistés par une intelligence artificielle, le pianiste Francesco Tristano et Alex Braga ont composé en direct une œuvre audiovisuelle féérique. Comment décrire l’étrange avec la familiarité des mots ? Les procédés technologiques mis en œuvre dont nous ignorons presque tout? Portés au sommet, les arts numériques s’apparentent à de la magie; les questionnements sur notre environnement et la charge émotionnelle en plus.

Crédit Photo: Oriol Reverter Photography
Dans le cadre des événements Play, le Laut accueillait Verraco, Umo et Boska. On a retenu la performance du colombien Verraco qui a confirmé les critiques élogieuses à son égard. La brutalité de sa techno faussement chaotique a laissé les auditeurs bouche bée. A coup sûr, on suivra de prés l’évolution de son label, Insurgentes, qui se révèle du même calibre. Boska a assuré un closing impitoyable, sans conteste, l’un des plus beaux sets de la semaine.
C’est dans la célèbre fabrique de la bière locale Estrella Damm que se tenaient les shows « Experience ». Pour ne rien vous cacher, notre attention s’est surtout portée sur la scène intérieure Maquinas, qui proposait VDJ et DJ sets de très haute volée. On a été touché par la poésie post-minémaliste de Kelly Moran, la subtilité de Line Katcho et la puissance d’Intercity-Express. Ici, encore, on s’est réjoui d’une telle concentration de talents mais surtout de l’intérêt du public pour l’ambient et les musiques électroniques expérimentales. Souvent ignorées par les programmateurs car jugé trop clivantes, le Mutek parvient à mettre en valeur ces courants musicaux qui ont tant contribué au développement des musiques actuelles. On applaudit !

Crédit Photo: Phlame
Le Mutek reste un festival de niche mais il n’oublie pour autant le dancefloor comme en attestent les Nocturnes 1 et 2 du week-end au Nitsa/Astin club. Le local Olaf Blanch, venu avec un set up impressionnant, a fait voyager le public; la techno africaine de Slikback nous a secoués. On a également été marqué par la présence de Kode 9 B2B Mala rappelant les meilleures heures du dubstep ou encore la noirceur du set de Donato Dozzy. Toutefois et ce fût pour nous l’un des meilleurs moments de la semaine, on a littéralement craqué pour la britannique Mina accompagnée de son acolyte, Bryte. Basses monstrueuses, rythmes caribéens et trap sur-boostés, refrains tonitruants du toaster ghanéen, le duo a incendié le Nitsa, le public se souviendra longtemps de leur passage.

Crédit Photo: Oriol Reverter Photography
Que dire de cette édition du Mutek BCN ?
Le club Nitsa est un haut lieu de la musique électronique à Barcelone mais peut-être aurait-il fallu choisir un endroit plus atypique afin de marquer l’événement? Une fois encore, notre point de vue est à relativiser. Devant les difficultés croissantes à organiser les festivals, il se pourrait que les clubs retrouvent de leur vigueur et jouent à nouveau leur rôle dans le développement des musiques électronique; affaire à suivre !
Globalement, on n’avait jamais vu une telle concentration d’innovations technologiques servie par des artistes aussi géniaux. Plus qu’aucun autre festival, le Mutek nous montre que mêlés au génie créatif humain, algorithmes et Intelligence Artificielle étaient susceptibles de réenchanter le monde. Que vous soyez fans de musiques électroniques, d’arts digitaux ou tout simplement curieux, on vous conseille de saisir toutes les opportunités pour assister au Mutek de Barcelone. Il est de toute évidence un festival de référence qui place la barre très haut tout en gardant son authenticité: foncez au Mutek !