Cette année Les Siestes Electroniques fêteront leur dix-huitième anniversaire. L’opportunité pour nous de revenir avec son directeur, Samuel Aubert, sur un festival qui a toujours cultivé une certaine idée de l’élégance à travers une programmation originale, déconcertante parfois mais au succès populaire jamais démenti. L’événement se déroulera du jeudi 27 juin au dimanche 30 juin. Il recevra notamment DJ Slickback, Sotoffet, Ben Shemie, Dis Fig, BbyMutha, OD Bongo.
Les Siestes organiseront également la nuit américaine du samedi 29 juin au ThéâtredelaCité où sont attendus Tim Lawrence et Patrice Vidal, mais aussi Graal en warm up et Yohm en closing.
Offrant un espace réduit mais chaleureux , Les Siestes possèdent un charme fou auquel toulousains et visiteurs succombent à chaque édition. Festival de niche assumé, outre la qualité des artistes invités. La force des Siestes réside à l’usage totalement libre du jardin public : fans de musique, curieux ou passants un peu blasés se croisent en choisissant de se mêler à la fête, ou pas, de danser ou de rester allongés sur l’herbe. Cette année les Siestes organiseront un festival à Nogentsur-Marne qui se tiendra du 7 au 8 Septembre au parc de la fondation des artistes. Suite au succès de l’édition de Coimbra l’an passé, Les Siestes reviendront au Portugal avec une programmation aussi alléchante.
Ce petit monde se côtoie avec bienveillance dans les premières chaleurs de l’été. Halte à la description d’un festival unique en genre et place maintenant aux propos de Samuel Aubert qui eût la gentillesse de répondre à nos questions.
Avec un esprit intransigeant sur son organisation, la gratuité du festival reste intacte. Invitation à partager un plaisir pour la découverte musicale pour ce 18e rendez-vous qui s’annonce encore incroyable.
LOFI | Quels rêves vous ont guidés dans la création des Siestes ?
Samuel : ça n’est pas tant des rêves qui nous ont poussés à créer un festival que l’ennui. L’ennui d’avoir 20 ans à Toulouse en 2001, de ne pas voir les musiciens que l’on écoutait se produire sur place. De n’avoir pas grand-chose à faire des longs mois d’été.

LOFI | Comment expliquez-vous le succès des Siestes ?
Samuel : je pense que c’est la forme très généreuse du festival. Ouvert à tous, qui a participé de son succès populaire. Et, je l’espère, la qualité de sa programmation artistique.
LOFI | Quelles seront les nouveautés pour cette édition ?
Samuel : en 2019, on souhaite s’éloigner un peu de la diffusion événementielle pure et dure, portée par l’actualité.
Notre but est simple : faire découvrir de belles chansons, être bouleversé par la musique.
Ceci passe par l’organisation de concerts, comme on sait bien le faire. Mais on a aussi eu envie de pouvoir mettre en exergue des œuvres plus anciennes, dont les auteurs sont parfois morts, ou des musiques qui ne participent pas de l’industrie musicale. Il y aura ainsi des sessions d’écoute d’album commentées lors de notre édition 2019. Ainsi qu’une matinée dédiée au champ sonore naturel, celui qui préexiste à l’Humanité et qui ne lui survivra peut-être pas.

LOFI | L’affiche est un appel du cœur à la cause écologique mais n’est-il pas paradoxal d’organiser un festival dans un parc ?
Samuel : non, pourquoi cela serait-il paradoxal ? L’impact écologique de notre festival serait-il moindre si nous organisions notre événement en salle ? En réalité, ce qui grève le bilan carbone d’un festival, ce sont les transports en avion (et de très loin). Ce qui est paradoxal, c’est de mettre des toilettes sèches, des verres et de la vaisselle réutilisables, des poubelles de tri partout, mais de continuer à faire venir des artistes du bout du monde.
LOFI | Quels bilans avez-vous tirés de l’application Blockchain My Art ?
Samuel : le bilan est que trop peu de spectateurs ont téléchargé l’application Blockchain My Art en 2018. Cette application de paiement transparente (que l’on n’impose pas sur le festival) permet de voir quel usage nous faisons de l’argent que nous donnent les festivaliers. Nous sommes persuadés que l’application finira par devenir un label de qualité et une marque de confiance, un peu comme l’application Yuka. Celle-ci vous permet de savoir ce qui se cache derrière un emballage alimentaire. Blockchain My Art, elle, va pouvoir révéler les festivals vertueux, les non lucratifs, ceux qui payent les artistes honnêtement.
La culture a besoin de retrouver des valeurs et les spectateurs d’y voir plus clair.

LOFI | Un article récent de Libération, soulignant l’augmentation des cachets des artistes et la saturation de festivals dédiés aux musiques électroniques, a récemment fait beaucoup parler de lui. Par jeu de dominos, ne craignez-vous pas que cela se propage aux festivals de niche et d’envergures modérées comme le vôtre ?
Samuel : nous sommes « hors du jeu ». La starification des DJ, l’augmentation des cachets, la concurrence exacerbée entre festivals, tout cela est probablement vrai mais ne nous concerne pas. Nous nous sommes volontairement et de longue date mis à part. Notre modèle économique a été pensé pour nous préserver de tout cela. De cette mécanique de marché dont il est, somme toute, étrange de s’étonner tant elle est vieille comme le monde.
LOFI | Les festivals ont tendance à monopoliser l’action artistique et culturelle, nous assisterions ainsi à la festivalisation de la culture, qu’en pensez-vous ?
Samuel : il est un fait que la « festivalisation » de la culture est aujourd’hui largement consommée. Est-ce un bien ou un mal, je ne pense pas être le mieux placé pour le dire. Je dirais simplement que je crois que les festivals peuvent rester fidèles à leur raison d’être première : permettre à des artistes et des publics de se rencontrer dans des conditions que les institutions ne permettent pas.

LOFI | Les salles de concert souffrent et les festivals se multiplient malgré la disparition de certains d’entre eux. Selon vous, comment rééquilibrer le rapport entre lieux fixes et lieux éphémères dans le domaine artistique ?
Samuel : je pense que les festivals doivent et ont encore largement la capacité et la place d’être complémentaires des salles. 70% des artistes que nous invitons aux Siestes ne joueraient pas à Toulouse si Les Siestes n’existaient pas. S’il s’agit de faire les mêmes artistes qui jouent d’ores et déjà en salle, alors, oui, je suis d’accord, ça n’a pas de sens.
LOFI | Les Siestes, toujours un festival d’hipsters ?
Samuel : probablement mais du moment qu’on y croise aussi des gens de tout âge, qui n’en ont rien à faire de la mode et des dernières tendances, on est bons. Il me semble que c’est le cas, qu’on arrive à réunir les hipsters (si tant est qu’on puisse en donner une définition) mais pas que.
Les Siestes se produisent aussi cette année à : Nogent, Coimbra.
Toutes les informations à retrouver ici.